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HAUT COMMISSARIAT AUX DROITS DE L’HOMME
ONU
A l’attention de Monsieur A. Amor
Rapporteur Spécial sur la liberté de religion ou de conviction
APPEL URGENT
Nous attirons votre attention sur une importante affaire d’atteinte aux droits religieux qui se déroule actuellement à Béthlehem en Israël. Il s’agit de la confiscation et de la destruction par les forces armées israéliennes d’une propriété du Patriarcat des Arméniens de Jérusalem, en vue de la construction, au beau milieu de la propriété, d’un mur sensé séparer Israël des zones palestiniennes. Depuis plus d’un an, tous les efforts déployés par le Patriarcat pour trouver une solution dans le respect de ses droits religieux légitimes sont restés vains, car après avoir illégalement occupé le couvent et causé des destructions, les forces armées ont commencé la construction du mur en question en dépit de l’opposition du Patriarcat.
Les lieux
Baron Der appartient à la Communauté arménienne depuis le moyen âge ; c’est un site archéologique connu pour ses nombreux tombeaux et ses souterrains, orné de près de 1600 oliviers plusieurs fois centenaires. Son couvent est le lieu d’habitation des moines et religieux qui officient dans l’église de la Nativité de Bethlehem ; c’est aussi le lieu de retraite et de méditation annuelle des religieux du Patriarcat de Jérusalem.
Les faits
L’affaire a commencé en 2001, lorsque le ministère de la Défense d’Israël a ordonné le 16 mai de la même année, la saisie pour 6 mois de la propriété par l’armée israélienne. Auparavant, depuis le début du mois de mai déjà les forces armées israéliennes avaient fait incursion dans Baron Der sans en aviser le Patriarcat.
Pendant cette première occupation, qui correspondait au siège de Bethlehem, les forces avaient déjà causé d’importants dégâts à l’intérieur comme à l’extérieur du couvent.
Dès lors, à la fin de l’été 2001, l’armée a continué les destructions dans le domaine : le mur d’enceinte de la propriété a été démoli et des oliviers centenaires ont été arrachés par les tanks. Les forces armées ont ouvert une route coupant le domaine en deux et laissant de chaque côté des terres inutilisables. C’est sur cette même route que les autorités israéliennes ont décidé de construire le mur de séparation.
Les demandes des moines d’arrêter les destructions sont restées sans effet.
Le Patriarcat a demandé des dédommagements au Ministère de la Défense dans une plainte présentée le14 septembre 2001 ; devant le silence du ministère, des plaintes ont été adressées le 27 novembre 2001, à toutes les autorités adéquates, parmi lesquelles le Représentant Spécial de l’UNDP.
Le 20 décembre suivant, le ministère de la Défense a répondu à la plainte du patriarcat, en niant l’intrusion de ses forces armées et les destructions dans la propriété.
Dans une deuxième lettre datant du 14 janvier 2002, le ministère informait le Patriarcat qu’il étudiait le problème sur la base de la plainte du 14 septembre 2001.
Depuis cette période, le ministère de la Défense ne répond plus aux courriers demandant des réponses aux demandes du Patriarcat.
Dès avril 2002, les forces armées israéliennes ont construit une route militaire reliant Gilo à la route principale de Bethlehem, qui, passant au milieu de la propriété arménienne de Baron Der sur un kilomètre, a causé des destructions importantes de tombeaux, de diverses richesses archéologiques ainsi que de nombreux arbres centenaires.
Tout en rassurant l’Eglise arménienne sur le caractère provisoire de la construction de cette route, les autorités militaires israéliennes demandent régulièrement au Patriarcat de leur louer le domaine en vue d’en faire leur Quartier Général. Le Patriarcat rejette cette demande qui n’est jamais formulée par écrit.
Par ailleurs, alors que les autorités israéliennes ont décidé de construire sur cette route un mur de séparation entre Palestiniens et Israéliens, le Patriarcat demande que ce mur passe par l’actuel mur d’enceinte de Baron Der, afin d’éviter le morcellement de ses terres et la destruction de lieux sacrés.
Enfin, après de longues tergiversations, et en dépit de toutes les requêtes du Patriarcat demandant la réparation des dommages et destructions estimés à 311 757 dollars US, le 19 juin dernier, l’Eglise arménienne s’est vue remettre par le représentant du Ministère de la Défense, Shmuel Hamburger, un ordre militaire d’occupation de la Propriété de Baron Der, en vue d’y construire un mur isolant les zones palestiniennes de Jérusalem.
Le 14 juillet 2002, le Patriarcat, en dernier recours, a intenté un procès contre la décision du Ministère de la Défense auprès de la Cour d’Appel de Tel Aviv.
Conclusion
L’occupation, sous prétexte de raisons de sécurité, suivie des destructions importantes de la propriété du Patriarcat arménien de Jérusalem constitue une atteinte grave aux droits religieux de la communauté arménienne. Les conséquences de ces atteintes sont inestimables et devraient être prévenues par la Communauté Internationale dans les meilleurs délais.
Aussi, nous soumettons ce cas de graves violations à l’attention des organes du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme, et en particulier du Rapporteur Spécial sur la liberté religieuse, afin de saisir les autorités israéliennes et d’obtenir un retrait de ses décisions illicites.